Michka Saäl

Prisonniers de Beckett

2005, documentaire, 85 minutes, anglais, suédois, russe avec sous-titres français

Nominé pour deux prix Gemini, dont Meilleur Scénario, Documentaire

Générique        Critiques        La vie du film Secrets de tournage

 

Synopsis

Entre tragique et burlesque, Prisonniers de Beckett nous invite à traverser les apparences pour nous rapprocher de « ceux qui vivent dans le noir ». Grâce à la puissance lumineuse du théâtre de Beckett, des hommes écrasés par la condition carcérale se réapproprient un langage, et réalisent l’impossible : sortir de leur corps enfermé pour retrouver leur âme libre.

 

extrait

Générique

Recherche, scénario, réalisation : Michka Saäl

 

Image : Sylvestre Guidi

Son : Didier Pecheur

Montage : Nadia Ben Rachid

Musique : Bob Dylan

 

Production: ARTE France, ADR Productions, Qu4tre par Quatre Films, Office national du film du Canada

 

Avec Jan Jonson

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Critiques

 

Délibérément beckettien

“« Puzzle de prime d’abord abscons, le film de Michka Saäl est délibérément beckettien, dans le sens où le sens, justement, ne jaillit pas immédiatement des images. Hésitant entre la fiction et la réalité, le documentaire se construit peu à peu une identité, à partir des image d’archives tournées dans les années 80, d’entretiens récents avec les fugitifs, d’extraits du récit du charismatique Jan Jonson. Le tout sur des musiques de Bob Dylan. Il faut se laisser happer par le récit pour en saisir l’essence, abandonner les illusions de l’objectivité pour en savourer la profondeur. En trois mots : il faut attendre. »

Nicolas Delesalle, Télérama,22 février 2006

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Magnifique… cathartique… mystérieux

« Eh bien, c’est magnifique. Coup de poing à l’estomac. Pour qui déteste les comédiens qui surjouent dans une fausse retenue de sentiments affectés, ces cinq jeunes taulards font ressurgir une émotion archäique, cathartique, mystérieuse. Avec la vie qui s’introduit dans la fiction et pulverise le béton. Avec les mots de Beckett infiltrés dans les os et jaillis comme des pleurs. »

Marie Muller, TéléObs, 27 février 2006

Ambitieux

« (Ce) n’est pas votre documentaire habituel, et tant mieux… un long métrage ambitieux sur l’absurdité des conditions carcérales à partir d’un fait divers digne d’un polar. »

Charles-Stéphane Roy, Ici, 10-16 novembre 2005 

Passionnant et incontournable

« Avec une bonne histoire qui dépasse l'anecdote pour atteindre au rôle de l'art, de la liberté, de la rédemption et du destin, Michka Saäl nous livre un document passionnant et pour tout dire incontournable. »

Odile Tremblay, Le Devoir, 13 novembre 2005

 

Complexe, mais fluide

« La construction du film de Michka Saäl est complexe mais toujours fluide, notamment grâce à un montage qui parvient à traduire finement la force poétique des mots et à créer un suspense… Comme un puzzle (le terme est de Saäl), le récit s’élabore à l’aide de petits détails qui s’ajoutent progressivement et qui forment finalement un tout. »

Carlo Mandolini, Voir, July 10-16, 2005

 

Un peu fouillis (!)

« Bien qu’assez magnétique, ce documentaire reste un peu fouillis, mélange les époques, le vrai et le faux… Bref, on ne déduit rien de ce film. »

Vincent Ostria, Les Inrockuptibles, 27 février 2006                   

 
 

La vie du film

2017

Cinématèque québécoise, Montréal

2007

Festival de Cannes – Sélection ACID

Sélectionné pour le Prix Europa, Berlin

Centre Beaubourg, Paris 

2006

FID Marseille, France

Lisbon International Film Festival

Tübingen - Stuttgart International French-language Film Festival, Germany

Festival du Nouveau Cinéma, Montréal

Rencontres internationales du documentaire de Montréal

Films de Femmes, Créteil, France

Cinéma du Réel, France 

En salle : Ex-Centris, Montréal

Télévision : Télé Québec and ARTE/France

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Secrets de tournage

Les détenus de la prison de Kumla en Suède en route avec Jan Jonson, pour donner une représentation de En Attendant Godot hors de prison.

Les détenus de la prison de Kumla en Suède en route avec Jan Jonson, pour donner une représentation de En Attendant Godot hors de prison.

Les origines du film 

« La réalisatrice est convoquée par son producteur pour parler d’un projet de documentaire sur le jazz. Michka Saäl file à Paris, le cœur battant : “Désolé, mais le jazz, ça ne peut pas marcher” dit le producteur. Douchée, la réalisatrice demande pourquoi, dans ce cas, on l’a fait venir à Paris. “Pour vous connaître. Que faisiez-vous à Stockholm?” Michka Saäl improvise. Hors de question de parler de ses histoires de cœur (brisé). Elle travaillait. Un projet. A propos de cinq prisonniers qui ont joué Beckett et se sont évadés. “La, je signe tout de suite !”  dit le producteur ».

Propos recueillis par Nicolas Delesalle, Télérama, 22 février 2006

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C’est comme un jeu

« Un film beckettien, donc bizarre, sans commentaire, construit comme un puzzle qui ne livre pas facilement ses clés, sa forme définitive. Et tait l’évasion jusqu’aux dernières minutes. “Ce n’était pas mon propos, explique Michka Saäl. Je ne voulais rien d’anecdotique, rien de spectaculaire. Ce n’est pas aride pour le plaisir, c’est comme un jeu dans lequel on entre progressivement.” »

Propos recueillis par Nicolas Delesalle, Télérama, 22 février 2006

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Rater encore, rater mieux

« Parfois pendant le tournage, Jan s’arrêtait brusquement et me disait, paniqué, “Michka, c’est terrible, je ne sais plus si ce que je viens de jouer là est arrivé dans cette prison avec ce prisonnier-là, ou ailleurs avec un autre.” Je lui répondais toujours “c’est pas grave, tout est vrai puisque tu l’as vécu, et puis tu es sur une scène de théâtre, tu recrées ta vérité, c’est ce que tu joues et ce que tu sens en le rejouant qui doit être vrai !” »

Propos recueillis par Olivier Pierre, 23 juin 2005, pour FID Marseille

Jan Jonson and Samuel Beckett. Photo: Beppe Arvidsson

Jan Jonson and Samuel Beckett. Photo: Beppe Arvidsson

Ça me plaît de faire bouger des choses. Dans Prisonniers de Beckett, il y a des gens qui ne comprennent pas ce qui est vrai et ce qui n’est pas vrai, parce qu’il y a du théâtre dans le film. Tout ça pour raconter une histoire. J’ai interviewé des gens, dix-huit ans après les événements. Il y en a qui n’ont pas vieilli c’est incroyable. Donc on ne sait pas ce qui est vrai et ce qui est mis en scène. Ça c’est une chose qui m’intéresse. L’autre chose c’est de mélanger les arts. Justement de mettre théâtre dans le film, et de la danse et la poésie.

leçon de cinéma, Université de Montréal, Observatoire de cinema au Québec (Mardis OCQ), 2014

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Comment Michka a convaincu Jan Jonson de se lancer dans le film

« J’ai dû lui démontrer que j’aimais Beckett et que je connaissais très bien son œuvre. Pourtant, ça ne suffisait pas, il me répétait: “Why, but why?” Puis un jour, je lui ai dit : “It’s because of you”, parce que les belles histoires arrivent à ceux qui savent les raconter. Alors il a dit : “Oh yes, okay, let’s go, baby!”. »

Propos recueillis par Carlo Mandolini, Voir, 10-16 avril 2005

Prisonniers de Philistins

J’ai travaillé sur une version réduite de 52 minutes pour la télé, version « philistine » qu’elle disait, que Michka n’avait pas le goût de faire. Le fait que Michka soit une sorcière s’est aussi manifesté dans ce processus. Étonnamment, on a fait avec cette version courte un petit film dans lequel l’énergie Beckettienne a émergée différemment du long métrage original par le fait de le morceler, d’en faire un cut-up. Sans rien enlever à la version originale qui tient, selon moi, du chef-d’œuvre, cet objet né d’un dilemme philistin nous a vraiment étonné, étonnamment satisfaisant.

Michel Giroux, Monteur

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Le plus beau des cadeaux

Mon deuxième long métrage avec Michka. Quelle aventure. Pour le tournage Michka m’avait demandé de bien prendre soin de Jan Jonson, grand acteur suédois et personnage principal du film. Cela voulait dire rester avec lui jusqu’au petites heures du matin à écouter ses histoires toutes plus rocambolesques les unes que les autres. Il m’a appris Beckett, le Théâtre. Il a parlé de Bergman qui avait été son professeur. De son audition avec Tarkovski à l’âge de dix huit ans. Et bien sûr de son travail de metteur en scène dans les prisons du monde entier. J’ai compris plus tard que Michka m’avait fait le plus beau des cadeaux. Et il y en aurait bien d’autres.

Sylvester Guidi,Directeur de photo

FID MARSEILLE 2005